Poème du mois de Jean-François Mathé

L’aube est de brume fine, comme pour maintenir dans les yeux éveillés une couleur de sommeil. J’ouvre la maison à la fraîcheur, aux premières voix de villageois qui saluent comme on s’ébroue. Et l’envol d’oiseaux dans la haie laisse trembler, plus longtemps sur les feuilles l’étonnement d’être là, oubliée la mort.

Je laisse entrer le crépuscule sans rien dire, comme pour me creuser de silence et recueillir l’ombre. C’est à cet instant que j’aime le mieux la fenêtre: on dirait une blessure qui rétrécit et reprend le sombre sang que le jour avait tiré d’elle.

Jean-François Mathé Corde raide fil de l’eau.1991.